Augmenter ses ventes grâce aux applications de livraison de repas à domicile : une perspective séduisante pour un entrepreneur qui gère un food-truck, un snack-bar ou un petit restaurant.
Les plateformes comme Uber Eats, Deliveroo ou JustEat jouent en effet un rôle de plus en plus essentiel dans la vie de nombreux clients, qui préfèrent désormais ne pas avoir à sortir de chez eux pour déguster leur plat préféré ou partir à la découverte de saveurs inconnues.
Cependant, l’utilisation de ces services ne présente pas que des avantages. Mentionnons rapidement les frais élevés et la dépendance à la plateforme.
Faut-il adopter ce genre d’application quand on est restaurateur ? Pour y voir plus clair commençons par quelques données chiffrées :
Une adoption de plus en plus massive
D’après une étude de Food Service Vision mentionnée par Snacking.fr [1] le secteur des plateformes de livraison de repas a progressé de 10 % pendant la pandémie de Covid-19 et continue son ascension.
Les restaurateurs qui ont recours à la livraison seraient 43 000 [1] soit environ 25 % d’entre-eux [2].
Si l’on considère que le secteur de la restauration rapide, qui représente la moitié de celui de la restauration, le pourcentage est sans doute nettement plus élevé, peut-être 50 %.
Quelques-unes des applications les plus populaires.
Toujours dans le secteur de la restauration rapide, ces plateformes apporteraient 26 % du chiffre d’affaires [1] [2].
On voit qu’il s’agit d’une tendance qu’il est impossible de négliger dès lors que l’on possède un business dans le secteur de la restauration. Voyons rapidement comment fonctionnent ces plateformes :
Comment ça marche ?
Avoir une vue d’ensemble du mode opératoire de ces plateformes est indispensable pour mieux envisager les avantages et inconvénients, notamment les coûts de ces services.
En premier lieu, sachez que la commande et le paiement sont effectués par le client sur l’application de livraison, et non sur le site ou le logiciel de caisse du restaurateur.
Le commerçant peut visualiser sa commande :
- sur une tablette fournie par la plateforme,
- ou directement sur son logiciel de caisse, si l’intégration est prise en charge.
La livraison peut être assurée par le restaurateur ou directement par la plateforme.
Ensuite, il y a deux possibilités en ce qui concerne la livraison. Celle-ci peut être gérée par :
- la plateforme, ce qui occasionne des frais d’environ 30 % sur le montant de la commande ;
- le restaurateur, ce qui réduit les frais d’utilisation de la plateforme à environ 15 %.
Pour information, la plateforme Just Eat ne fonctionne que selon ce dernier modèle. Nous verrons un peu plus loin à partir de quel montant de chiffre d’affaire on peut envisager d’embaucher du personnel pour se charger soi-même de la livraison.
Un bon moyen de booster ses ventes
Pour les micro-entrepreneurs et les petits entrepreneurs du secteur alimentaire, il y a plusieurs avantages à recevoir des paiements via des applications de livraison.
Plus de clients et de chiffre d’affaires
La conséquence la plus immédiate de l’utilisation d’applications de livraison pour recevoir des paiements est d’attirer plus de clients. C’est aussi un moyen de fidéliser des clients existants.
Les personnes qui habitent loin de votre restaurant ou de votre snack-bar verront vos produits sur leur liste d’options. Vous pourrez également attirer d’autres publics, tels que les personnes ayant des difficultés à marcher et celles qui fuient l’agitation de certains lieux de restauration.
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Des outils marketing efficaces
Les petits commerçants n’ont pas forcément digitalisé leur offre. Pour un prix de mise en service de quelques centaines d’euros les plateforme de livraison vous aident à créer un menu en ligne et peuvent même venir prendre des photos sans frais
Les application sont très efficaces pour recueillir des données sur votre clientèle. Elle pourront vous fournir des statistiques qui vous aideront à améliorer votre rentabilité.
Autre avantage de leur algorithmes : la possibilité de favoriser le cross-selling, avec par exemple un achat de boisson ou de dessert suggérés avec le plat.
Un gain de notoriété rapide
Les plateformes de livraison sont un excellent moyen de se faire connaître lorsque l’on débute une activité de restauration. Ajoutez à cela une fiche Google My Business bien remplie et vous maximiserez les chances de démarrer votre activité sur de bonnes bases.
En outre, si votre service est de qualité, vous bénéficierez de commentaires élogieux et d’une bonne note, qui vous fera remonter dans le classement de la plateforme et augmentera encore votre visibilité.
Faut il avoir ses propres livreurs ?
Le coût de la livraison représente environ 15% du montant de la vente. Cela est vrai que vous passiez par un service de livraison tiers, ou par le service de livraison de la plateforme.
Imaginons que vous embauchiez un livreur au SMIC ; cela vous coûterait environ 24 000 € par an. Théoriquement, cela devient rentable avec un volume de vente supérieur à 160 000 € par an, uniquement pour la vente à emporter.
Et cela ne tient pas compte du fait que vous n’aurez qu’un seul livreur à la fois, avec une qualité de service potentiellement réduite par rapport à une plateforme de livraison, qui dispose d’algorithmes performants pour répartir les tâches de plusieurs livreurs sur un même secteur.
Pour beaucoup de petites structures, il est donc plus rentable de passer par une plateforme de livraison. Autre possibilité : affecter ponctuellement un serveur à des tâches de livraison dans le quartier.
Pas mal d’inconvénients
Utiliser une application de livraison ne comporte pas que des avantages. Êtes-vous même sûr de gagner plus d’argent en les utilisant ?
Un investissement pas forcément rentable
On a vu précédemment qu’il est plus rentable pour un petit commerce de faire appel à des livreurs extérieurs plutôt que de créer un ou des postes de livreur, malgré les 15 % de frais sur la livraison auxquels on ajoute les 15 % de frais d’utilisation de la plateforme. En simplifiant, si la plateforme de livraison prend 30 % de commission mais qu’elle fait augmenter les ventes de 30 %, cela représente tout de même une augmentation du chiffre d’affaire de 20 %.
Il faudra aussi ajouter le coût des emballages, qui sont à votre charge.
Ceci ne prend pas en compte la question de la rentabilité du capital. En effet, afin d’accroître le volume de vente, il va peut-être falloir investir c’est-à-dire s’équiper en matériel ou même embaucher, ce qui peut faire chuter la rentabilité, voire la faire entrer en territoire négatif. Si le personnel et le matériel sont sous-employés, l’utilisation d’une plateforme de livraison comme Uber Eats ou Deliveroo aura plus de chance d’être profitable.
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Problèmes de contrôle de la qualité
L’un des principaux inconvénients de ces plateforme externes est l’absence de contrôle de votre part.
On pense en premier lieu à la qualité du service fourni. En ce qui concerne plus particulièrement la réception des paiements, si le client retire sa commande parce qu’il n’a pas pu finaliser la transaction, vous le saurez, mais vous ne pourrez pas y faire grand-chose. Vous n’êtes en effet pas directement relation avec la passerelle de paiement.
Même chose à propos de la livraison. Si le service est défectueux, vous risquez de recevoir des avis négatifs, bien que vous ne soyez pour rien.
Les politiques de retour de commandes et de rétrofacturation ne seront pas non plus déterminées par vous.
Limitation des moyens de paiement
Vous ne pourrez pas non plus proposer d’autres formes de paiement que celles qui sont proposées par la plateforme.
Par exemple, Uber Eats n’accepte que les titres restaurant d’Edenred et de Swile alors que Deliveroo accepte en plus les tickets Up Déjeuner et Pass Restaurant
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Dépendance
Est-ce souhaitable de confier 25 % de son chiffre d’affaires à un plateforme qui peut changer du jour au lendemain ses conditions de vente ?
Enfin il ne faut pas oublier que ces apps de livraison ont le contrôle total de votre fichier client, ce qui n’est pas le cas lorsque vous ne faites que de la vente à emporter avec vos propres outils de vente en ligne.
Une évolution sociétale néfaste ?
Les services de livraison à domicile ne sont pas toujours bien vus, notamment en ce qui concerne le statut des livreurs. Officiellement des entrepreneurs, mais pour certains des salariés déguisés. L’expression « ubérisation de la société » se réfère à l’apparition massive de ce statut hybride qui est habituellement connotée négativement.
Et comment envisager le travail de livreur de repas en lui-même : comme une source de revenus indispensable pour des personnes peu qualifiées ou comme de l’exploitation ?
Il y a aussi la question des emballages : non seulement ils sont à votre charge, mais ils représentent un important volume de déchets. Les plateformes de livraison incitent leurs partenaires à choisir des emballages recyclables issus de filières vertueuses, mais dans l’absolu, cela représente quand même une masse de déchets à traiter. Cela va a l’encontre de la politique de développement durable dans la restauration.
Les clients de ces plateformes ne se posent sans doute pas trop de questions, mais on ne pouvait la passer sous silence, car l’image de votre entreprise de restauration est en jeu.
Les services de livraison sont-ils indispensables ?
Les applications de livraison ne sont pas la panacée pour augmenter les bénéfices d’une petite entreprise de restauration. Les frais de 30 % sont l’inconvénient n°1. Si l’on recherche une solution alternative moins couteuse, le Click and Collect est la solution à envisager en premier. Entièrement gérable en interne sans trop de frais, en commençant par une simple prise de commande par téléphone, pour aller ensuite, si le besoin s’en fait sentir, vers des solutions automatisées intégrées ou connectées au logiciel de caisse.
Cela-dit la popularité de ces services auprès des restaurateurs n’est pas sans raison ; leur utilisation procure un gain de chiffre d’affaires et une augmentation de la notoriété. Les établissement qui pratiquent déjà la vente à emporter (sur place ou en click and collect) sont ceux qui ont le plus intérêt à ajouter Uber Eat ou Deliveroo à leur canaux de vente.
Sources
[1] Snacking.fr – Malgré l’inflation, les Français conservent leur appétit pour la livraison de repas (mai 2023)
[2] Insee – Fiche secteur 561 – Restaurants et services de restauration mobile