La restauration durable s’inscrit dans le cadre plus large de l’alimentation durable, qui vise à conjuguer respect de l’environnement et faisabilité économique.

La législation évolue vers plus de durabilité, avec des contraintes qui s’imposent peu à peu, d’abord à la restauration collective, puis à la restauration commerciale à laquelle nous nous intéresserons ici.

En tant que gérant de restaurant ou de café, vous pouvez vous adapter aux nouvelles contraintes, ou mieux, les anticiper, par conviction, mais aussi par intérêt économique.

Comment agir pour une restauration durable ?

On a tendance à se focaliser sur la production de CO2, mais il faut aussi penser déchet, pollution, respect des sols,  économies d’eau etc.

Sur quels leviers pouvez-vous agir pour améliorer l’impact environnemental de votre activité de restaurateur ?

Nous en voyons cinq :

  • Choix des bons produits et fournisseurs
  • Lutte contre le gaspillage
  • Meilleur gestion des déchets
  • Réduction des dépenses d’eau et d’électricité
  • Communication et sensibilisation

Ils sont liés les uns aux autres : par exemple on peut réduire gaspillage et déchet et effectuant les bons approvisionnements.

Pour chacun d’entre eux, nous proposerons de nombreuses actions à mettre en place dans votre restaurant ou votre café.

Choisir les bons aliments

Si l’on en croit cette présentation de l’Ademe (Agence de l’environnement de la maîtrise de l’énergie) l’empreinte carbone du secteur de l’alimentation, est dû pour 67 % à l’agriculture, pour 19 % au transport, et seulement pour 5 % au bout de la chaîne, c’est-à-dire à la distribution et la restauration. La réflexion sur le choix des aliments et des modes de culture et leur origine géographique est donc primordiale.

Quelques suggestions :

Favoriser les circuits courts et les aliments de saison – Cela réduit l’impact du transport, mais aussi peut réduire des gaspillages énergétiques liés à la culture hors-saison, même près de chez vous.  D’autre part, les fruits et légumes durent plus longtemps lorsqu’ils sont mis en magasin juste après récolte. Pourquoi ne pas imiter les cantines scolaires et passer un contrat avec une ferme ou une AMAP ?

Choisir des fruits et légumes issus de modes de culture respectueux de l’environnement – On pense spontanément à l’agriculture biologique et à l’agriculture raisonnée, qui emploient moins de pesticides. Il y a aussi la permaculture, qui essaie de s’intégrer au mieux à l’écosystème environnant. Ne pas oublier qu’un sol maintenu vivant retient beaucoup mieux l’eau, procure des aliments plus goûteux et plus sains, et fixe le carbone dans le sol.

Légumes sains et biologiques

Choisir des aliments biologiques favorise le maintient de la santé des sols.

Préférer la pêche durable ou locale – Respect des stocks de poisson, réduction de la consommation d’énergie, meilleure gestion des déchets : difficile d’être contre. Il reste le problème de l’approvisionnement. Dans certaines régions, la pêche locale est anecdotique et réservée aux restaurants haut de gamme.

Mettre moins de viande et plus de végétaux à sa carte – L’élevage consomme beaucoup d’eau et de céréales. On peut proposer des plats végétariens ou végans ou bien peser de manière précise les portions de viande et de poisson, dans la mesure du possible.

Avoir un jardin d’herbes aromatiques – C’est mieux en pleine terre, mais on peut aussi les cultiver en pot. Ces cultures prennent assez peu de place. Les plantes aromatiques du commerce comme le persil et la coriandre sont malheureusement souvent arrosées de pesticides, et d’autre part elles se conservent mal.

Grouper les commandes avec d’autres restaurateurs – Et pourquoi pas ? Cela peut réduire les coûts de transport, mais aussi stabiliser l’activité d’un fournisseur local.

L’association Bon pour le climat propose un éco-calculateur, qui donne un triple score (environnement, nutrition, société) à vos recettes de cuisine.

Lutter contre le gaspillage alimentaire

Lutter contre le gaspillage, c’est aussi réduire les déchets : on fait d’une pierre deux coups.

La Loi Egalim contre le gaspillage alimentaire, cf. le  PDF de l’Ademe, impose aux restaurants commerciaux de mettre à disposition des clients qui n’ont pas fini leurs plats des contenants réutilisables ou recyclables (gourmet bag ou doggy bag) sauf pour des produits particulièrement périssables.

La loi Agec anti-gaspillage et pour l’économie circulaire indique même que les secteurs qui produisent ou transforment des denrées alimentaires ainsi que la restauration commerciale devront également réduire de 50 % leur gaspillage alimentaire par rapport au niveau de 2015 et cela d’ici 2030.. Voir le site du Ministère de l’Écologie.

C’est un bon début, mais on peut faire encore plus, par exemple :

Ne pas donner de trop grandes quantités  – On peut commencer par évaluer régulièrement l’état des assiettes qui sont desservies : certains plats sont-ils trop copieux ? Certaines décorations et garnitures finissent-elles systématiquement à la poubelle ? Le pain est-il découpé et distribué de manière aléatoire ou calibrée ?

Il n’est pas logique de donner la même quantité à tout le monde quand on y réfléchit. Pourquoi ne pas introduire en France le concept de la demi-dose qui existe au Portugal ? Ou bien faire payer au poids ? Ou réaliser ses recettes au gramme près ?

Petite portion dans un restaurant

Et si vous offriez la possibilité de commander de petites portions pour les appétits d’oiseau ?

Augmenter durée vie des aliments – Mettre sous vide ou congeler si l’on a vu trop grand.  Ranger régulièrement la chambre froide pour ne pas laisser périr des produits dans le fond de celle-ci. L’approvisionnement en circuits courts a également son utilité ici : plus frais, les légumes durent plus longtemps.

Réutiliser les restes ou les déchets – Réutiliser les restes de plat ou de carcasses pour d’autre préparation n’est pas une nouveauté. Mais la réutilisation de certains déchets (fanes de radis, peau de pastèque,  de concombre, etc. )ou eaux de cuisson pour faire des bouillons pourrait peut-être être plus poussée, à condition d’utiliser des produits biologiques, car les pesticides sont souvent concentrés à la surface.

Penser la carte et le menu – Pour faire le lien avec le paragraphe précédent, on peut essayer d’utiliser dans un plat les déchets d’un autre. La réduction du nombre de plats à la carte et une mise en avant du menu est une bonne manière de s’adapter aux approvisionnements. Si l’on est en lien avec des producteurs locaux, on voudra peut-être même créer un menu à la semaine plutôt qu’un menu du jour.

Mieux gérer les déchets

Ici, on ne va pas s’intéresser à la réduction des déchets alimentaire, et à leur réemploi en cuisine, mais à leur élimination et transformation. Du côté des matières inertes, il y a également beaucoup à faire.

Valoriser les biodéchets – Se renseigner sur les filières de récupération et  valorisation de sa ville ou de son département. Certaines associations et entreprises collectent les visuels de friture, les coquilles, le marc de café et tous les biodéchets végétaux fermentescibles pour produire du compost ou du biogaz.

Sinon on peut se contenter de les séparer, ce qui est déjà obligatoire (voir écologie.gouv) si l’on produit plus de 10 tonnes par an (5 tonnes en 2023) ou 60 litres d’huiles usagées.

Pour les autre déchets un tri 5 flux (papier, métal, plastique, carton, verre, bois dans une ou cinq poubelles) des déchets alimentaires est obligatoire si le volume produit est supérieur à 1100 litres par semaine, ce qui est fréquent dans la restauration et notamment la restauration rapide. Voir le PDF du Ministère de la transition écologique de l’époque.

La loi Agec (voir le site du Ministère de l’écologie) va encore plus loin puisque la restauration rapide devra, dès le 1er janvier 2023, utiliser de la vaisselle réutilisable pour les repas et les boissons servis sur place (gobelets, couvercles, assiettes, récipients, couverts). Rappelons que les couverts jetables et pailles en plastique ont été interdits en 2020 et 2021.

Plat réutilisable pour la consigne en restauration

Ce type de plat lavable et réutilisable est adapté à la consigne en restauration à emporter.

Réduire la consommation des emballages – Cela peut passer par l’achat en vrac, côté approvisionnement. Côté restauration à emporter, penser à inciter les clients à rapporter les emballages grâce à la consigne. Le système peut être mis en place par le restaurateur lui-même, ou être géré par un tiers qui peut même s’occuper du lavage des contenants.

Supprimer le papier – Pour commencer, le plus simple est de remplacer les tickets papier par des tickets de carte bancaire électroniques. Cela ralentit un peu le passage en caisse, mais permet d’alimenter sa base de donnée client, si en plus c’est bon pour l’environnement, pourquoi s’en priver ?

Pour aller plus loin et moderniser son restaurant, pourquoi ne pas passer carrément aux menus par QR code ? Finies les cartes poisseuses ou les tonnes de menus papier. Les clients peuvent consulter le menu sur leur téléphone et même passer la commande avec certaines solutions.

Économiser énergie et eau

Il s’agit prosaïquement de réduire sa consommation d’eau et électricité.

Économiser l’électricité

Tester d’autres modes de cuisson – Sans aller jusqu’au four solaire, qui fonctionne bien, mais pas pour un restaurant, on peut envisager des modes de cuisson peu énergivores. La cuisson à la vapeur est bien connue, mais avez-vous testé les cuissons basses températures ? Elles préservent mieux les vitamines et même les enzymes des légumes.

Étalonner les équipements –  Le four, comme le frigidaire a besoin d’être étalonné ; vérifier régulièrement le fonctionnement du thermostat. Côté chambre froide, celle-ci est-elle réglée correctement ? Cela vaut le coup d’étalonner vos appareils régulièrement et de vérifier qu’il n’y a pas des fuites de gaz réfrigérant. Par ailleurs, est-il possible de réduire la quantité d’aliments stockés dans la chambre froide ?

Brûleur à gaz

Un brûleur séquentiel maintient la hauteur de flamme constante, mais s’interrompt périodiquement.

Économiser lors de la cuisson – Il est bien connu qu’il ne faut pas ouvrir la porte du four de manière intempestive.  Côté brûleur à gaz, on peut commencer par ajouter des économiseurs, qui stockent la chaleur et investir plus tard dans un brûleur séquentiel pour réduire les dépenses et avoir une cuisson plus homogène. Si l’utilisation du gaz est impossible, on préférera les plaques à inductions aux plaques halogènes.

Pour les fritures utilisez systématiquement un thermomètre, cela améliorera la qualité des aliments et coûtera moins cher. Sinon, il y a des gestes simples comme l’utilisation des couvercles, sur les casseroles qui gagnent à être rappelés.

Enfin autre poste de dépense d’électricité important : l’éclairage.  Utilisez-vous des halogènes ? il serait temps de passer aux LEDs.

Économiser l’eau

En cuisine, cela passe par l’installation de régulateurs de débit au niveau des robinets, mais aussi par l’utilisation de bassines plutôt que de l’eau courante quand c’est possible. Il est plus économique de laver la vaisselle dans un lave-vaisselle qu’à la main, mais ces appareils ne sont pas du tout égaux en matière de consommation d’eau.

Au niveau de toilettes du restaurant, la solution la plus simple est d’installer une double commande, la solution la plus compliquée consiste à récupérer les eaux de pluie pour la chasse d’eau.

Communiquer et sensibiliser

C’est le dernier levier sur lequel agir. Faire, c’est bien, mais faire savoir ça n’est pas mal non plus.

Impliquer les clients – Leur expliquer pourquoi il n’y a que des fruits et légumes de saison, leur parler de votre intérêt pour la restauration durable et les circuits courts, leur proposer systématiquement des gourmets bags. Former le personnel de salle aux enjeux environnementaux pour qu’ils puissent eux aussi en discuter avec les clients.

Organiser des événements – Soirée à thème, dégustation. En lien avec la chambre d’Agriculture, les associations de producteurs biologiques ou juste votre producteur préféré.

Communiquer sur les réseaux sociaux – L’impact est possiblement important, mais il faut absolument publier régulièrement, ce qui peut être chronophage et source de stress si vous n’êtes pas à l’aise avec ces outils.