Il n’est pas rare de voir un commerçant refuser les chèques ou bien un médecin refuser les cartes bancaires.
Si vous êtes commerçant, vous vous demandez sans doute si vous avez le droit de ne pas accepter un moyen de paiement parce que les frais sont trop élevés, ou pour toute autre raison justifiée de votre point de vue.
Est-ce légal ? Que dit la loi à ce sujet ?
Nous verrons que la loi française est plutôt claire, mais attention aux exceptions !
Réponse simplifiée
Comme habituellement avec la loi et la réglementation française, il y a pas mal de complications et d’exceptions, que nous verrons plus loin, mais dans l’immédiat, essayons de simplifier au maximum :
- On ne peut pas refuser un paiement en espèces s’il est libellé en euros, sauf exception ;
- On peut refuser les paiements par chèque et carte, mais si l’on est adhérent à un centre de gestion agréé (CGA) on doit accepter au moins l’un des deux
En ce qui concerne les virements, il est possible de les refuser mais le cas ne se pose pas en pratique.
Voyons plus en détails ces deux règles, qui comportent plusieurs exceptions:
On ne peut pas refuser les paiements en espèce et en euros, sauf…
En principe, un commerçant n’a pas le droit de refuser les paiements en espèces, c’est-à-dire sous forme de pièces ou de billets libellés en euros. Sinon il est passible d’une contravention de 2e classe, soit 150 euros. [1]
Exceptions
Il est toutefois possible de refuser les espèces dans les cas suivants :
- Somme supérieure à 1000 € [2]
- Billets en très mauvais état
- Faux billets
- Devise autre que l’euro (ex. dollars ou livres sterling)
- Nombre de pièces supérieur à 50 [3]
- Rendu de monnaie impossible
- Raison de sécurité
En ce qui concerne le rendu de monnaie, il faut savoir que c’est en principe au client de faire l’appoint [4]. Donc, si le commerçant n’a pas suffisamment de monnaie, il peut refuser le paiement en espèces.
En France, la limite pour les paiements en espèce est de 1000 € sauf pour les étrangers non professionnels notamment les touristes, auquel cas la limite est portée à 15 000 €. [2]
Cas particulier
Les vendeurs de métaux précieux (or et argent) n’ont pas le droit d’accepter les espèces.
On peut refuser les autres moyens de paiement, mais…
Dans la loi rien n’oblige les commerçants à accepter des moyens de paiement autre que les espèces, sauf s’ils font partie d’un centre de gestion agréé.
Autrement dit, on peut tout à fait refuser des paiements par chèque, carte bancaire ou virement à condition d’en informer ses clients au préalable [5].
Les entrepreneurs individuels qui ne respectent pas cette règle d’information encourent une amende de 3000 € et les sociétés une amende de 15 000 € [6].
Cela doit se faire par voie d’affichage, dans les locaux où le public est présent, et être inscrit également dans les CGV conditions générales de vente.
Il est possible d’appliquer des conditions, par exemple : « paiements par chèque à partir de 50 € », « carte bancaire à partir de 5 € ».
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On n’a pas le droit de majorer le prix en fonction du mode de paiement. Par exemple : il est interdit de faire payer plus cher par carte. L’amende peut monter à 75 000 € pour une entreprise individuelle et 375 000 € pour une société [7].
Les entreprises qui ont adhéré à un centre de gestion agréé (CGA) doivent accepter au minimum les cartes bancaires ou les chèques. Autrement dit l’un des deux au choix est obligatoire [8].
On pourra toutefois refuser les chèques et cartes pour de petites sommes.
Là encore, les règles d’information s’appliquent ; il faudra indiquer en outre sa qualité d’adhérent à un CGA [9].
Cas particuliers
Les chauffeurs de taxi ont l’obligation d’accepter les paiements par carte bancaire. Voir à ce sujet Taxis et carte bancaire : quelles sont vos obligations ?
Conclusion : ce qui n’est pas interdit est autorisé
Mise à part l’interdiction de refuser des espèces, qui comporte de nombreuses exceptions, les commerçants et entrepreneurs sont assez libres dans leur choix de refuser tel ou tel moyen de paiement, mais ils doivent en informer la clientèle et ne pas pratiquer de majoration de prix sur tel ou tel mode de paiement.
Attention toutefois aux vendeurs de métaux précieux et les taxis sont soumis à une réglementation particulière.
Sources
- [1] Article R642 du code pénal sur Légifrance.
- [2] Article D111-2 du Code monétaire et financier sur Légifrance
- [3] Règlement (CE) nº 974/98
- [4] Article L112-5 du Code monétaire et financier sur Légifrance
- [5] Article L112-1 du Code de la consommation
- [6] Article L131-5 du Code de la consommation
- [7] Article L112-12 du Code monétaire et financier
- [8] Article 1649 quater E bis du Code général des impôts
- [9] Article 371 LA du Code général des impôts